Appeler les mots à se joindre à nous pour ne pas en venir aux mains... v'là, une idée qu'elle est bonne...
Parce que les mots, quand ils se mêlent à nous, ils nous démêlent parfois... le ventre et les idées.
Et des fois, les mots, quand on nous les prête, ils nous servent à fabriquer des histoires, pour les oreilles de sages... ou de passage.
Vous l'aurez compris... voici, ci-dessous, le petit dernier de la catégorie "un dernier vers pour la prose!".
Le slam suivant est issu d'un appel aux mots collectif, doublé d'une contrainte particulière.
Dix mots nous ont prêté par des gens présents à la dernière soirée slam:
friandise - gourmandise - fourchette - pirate - sans-papier - trésor - Rom - poubelle - mistral - poussière.
Comme contrainte, il fallait faire apparaître ces mots dans l'ordre (de friandise à poussière) puis dans le "contre-ordre" (repartir de poussière à friandise).
Le thème imposé était "l'innocence".
Petite remarque: comme le slam est un "sport" oral, la sonorité du mot l'emporte sur sa forme écrite, c'est pourquoi vous retrouverez rarement les mots sous leur forme initiale (si ça vous dit, vous pouvez tenter de les chercher...)
Allez, ziou, voici ma version (un peu remaniée depuis avant-hier soir).
L'innocence.
Lino sent ce...genre de choses...
Oui, il préssent les dires des gens friands de commérage...
Ces friands disent de lui qu'il est fou, et les gourmands disent bien pire...
" Il est contestataire ce Lino! Il est fou...r'jette tout!
Oui, il est fourchette de laiton, là où nous, tous, sommes couteaux d'argent... mais tôt ou tard, Lino... le pire arrive!
Oui, le pire attend celui qui ne se plie pas!
Alors, plie-toi, Lino!"
Aux règles de la ville?
Non, non..
Lino est rat des champs.
Il aime le ciel et le vent,
les étoiles, les bourdons...
Et quand parfois il l'a justement, le bourdon... il dit: "Je dois libérer ma soupape"..
Enfin...comme Lino a un accent, il ne le dit pas vraiment comme ça...
Non, lui, il dit.."Jé dois libérer ma sanpape...ouais...i' faut que jé libère ma sanpape..yeah..."
Il est drôle, Lino, il fait beaucoup de choses qu'on ne comprend pas.
Certains voudraient faire de lui quelqu'un de très ordonné... lui offrir un quotidien rangé...
Mais la vie de Lino est différente,
et il n'envie pas ceux qui ont un costard, ni ceux qui ont une maison.
Sa vie n'a pas de goût de soumission, son arôme est différent.
"Ma vie à moi, il est belle, il est la p'ou belle de toute..."
Et pendant que dans les tours de verre et de béton, des vices se trament dans l'ombre,
le mistral empêche que ne sombrent Lino et les autres comme lui...
qui n'ont ni toit, ni compte en banque, ni compte à rendre,
et qui poussent hier, comme demain, leurs problèmes toujours un peu plus loin.
Et quand tu demandes à Lino à quoi il pense, il répond:
" Euh...comment sé dit... "I miss tralev"...non... "I miss travel"...
..oui, c'est ça: je manque les voyages...
et moi, tou sais, les voyages, c'est ma vie" .
Mais Lino, des horizons de notre vie, il voit que les poubelles,
et sous elles, lentement ensevelie,
son histoire qui ne se lit plus...mais doucement se noie.
"Dehors, les roms!! Les roms, dehors!!"
Ils ne lui disent pas comme ça, mais ...Lino sent ce genre de choses.
Peu importe, il sait que de très horribles uniformes ne parviendront pas à faire de lui un simple sans-papier.
Alors Lino pense:
" Regarde-moi bien...
Le pirate que tu vois en moi n'a rien de fou...Rejette-moi, fourchette-moi si ça peut te défouler,
toi, pauvre foule en mal d'amour...
Tu me tends le gourdin, là où on m'avait promis gourmandises,
mais ils se gourrent, ils mentent, ils disent...
On m'avait dit :"La France, c'est une friandise"...
Une friandis..parue.
Oui, disparue, la France, pour bientôt et à jamais."
Oui, c'est ce que sent Lino... parce que Lino sent ce genre de choses.